Minitel -- the resistible rise of French videotex

Ewan Sutherland
The report of the French national auditors on Minitel.

Reproduced from the Journal Officiel.

Sorry! the text is in French and no translation is currently available.


Cour des Comptes


Rapport au President de la Republique

Suivi des reponses des administrations, collectivites, organismes et entreprises.


1989

Le Minitel

En mème temps qu'elle premait de recourir à la technique très novatrice de la fibre optique pour la mise en œ du plan câble, la France choissait, seule en Europe, de mener une politique audacieuse de développement du programme télétel, fondée sur la distirbution gratuite aux usagers de terminaux (minitels).

Ce programme a entrainé pour le budget annexe des PTT des dépenses d'investissement évaluées à environ 8 milliards de france à la fin de 1987, et s'est traduite par la mise à la disposition du public de plu de 4 millions de terminaux.

I Les options initiales

1 Le Contexte

Lorsqu'il apparut, vers le milieu des années soixante-dix, que la France allait combler son retard dans the domaine de l'equipment télécommunications fit porter sa réflexion, comme il était normal, sur les conditions dans lesquelles pourrait être assuré le relais de l'activité téléphonique.

En novembre 1978, un conseil interministériel décida de lancer à Vélizy une expérience de télématique à destination du grand public, la même démarche expérimentale étant adoptée pour mettre en œuvre l'annuaire électronique en Ille-et-Vilaine.

La réflexion se situait dans la perspective d'un marché potentiel dont l'essoir devait être assuré par la mise à la disposition gratuite des abonnés d'un terminal de consultation, qui se substituerait à l'annuaire téléphonique sur papier. La gratuité du terminal était preséntée comme la conséquence de celle de l'annuaire imprimé at justifiée, notamment, par les économies attendues sur les dépenses d'impression et sur celles du service des renseignements. Mais surtout, les équipements ainsi distribués devaient entraîner un développement de l'offre de services et donner naissance à un trafic dont le produit permettrait à l'administration d'amortir ses dépenses d'investissement.

Ces projects, dès qu'ils furent connus, ne manquèrent pas d'intéresser la presse, inquiète de l'incidence du noveau-média sur les recettes qu'elle tire de al publicité et des petites annonces, ainsi que le Parlement, préoccupé de voir la télématique se développer sans que, préalablement, une loi fût venue en fixer le cadre juridique.

2 Les choix

De 1981 à 1983, des commandes ont été passées portant chaque année, sur 300 000 exemplaires d'un terminal, le << minitel >>, fabriqué par trois constructeurs sur la base d'une norme d'application strictement française.

La réflexion sur le mode de rémunération des services offerts par les fournisseurs, a conduit à la mise en place d'une procédure réputée s'inspirer de la relation qui existerait entre l'acheteur et le vendeur de journaux sur la voie publique et, de ce fait, appelée procédure << kiosque >>. Cette méthode consiste, lorsque l'abonné se connecte à un service vidéotex, à faire enregistrer par son compteur téléphonique un certain nombre d'unités Télécom (2) selon un thythme qu'un dispositif technique permet de faire varier en fonction du tarif applicable au\ service consulté.

Un décret du 4 janvier 1985 autorise, dans ce cas, le ministre des postes et télécommunications à recouvrer la totalité de la rémunération, selon les modalités en vigeur pour les consommations téléphoniques et à en reverser une partie au fournisseur de services, tels que les << messageries >> professionelles ou conviviales, à condition qu'une convention ait été signée à cet effet.

En fait, la convention precise que, pour des raison techniques, les reversements, effectues par l'agent comptable des P.T.T., interniennent au profil du centre serveur, c'est-a-dire de l'entreprise qui dispose des ordinateurs hebergeant les services, a charge pour lui d'attribuer aux differents fournisseurs les sommes qui leur reviennent. L'administration etablit pour le compte des serveurs la facture correspondence sur l'Etat (1).

L'effet conjugue de la procedure kioskque, qui fait des comptables publics les collecteurs de fonds pour le compte des fournisseurs de services, et de la distribution gratuite des terminaux a entraine un rapide developpement du videotex. Etroitement associee a ce systeme, la presse a recu des concours financiers appreciables et s'est vu accorder le monopole de fait des services proposes au grand public sur le reseau 36-15.

Les chiffres qui characterisent le programme teletel - plus de cinquante-deux millions d'heures de connexions en 1987, soixante millions en 1988 pour, respectivement, 3 373 000 et 4 228 000 minitels installes au 31 decembre - permettent de mesurer le rapide developpement du noveau media. Ils sont a rapprocer du cout en investissement siot, au 31 decembre 1987, pres de huit milliards de francs (2), compte non tenu des depenses d'etude et d'experimentation. A la meme date, les recettes cumulees tirees, par l'administration des P.T.T., du reseau mis en place ne depassaient pas 3 millisrds de francs.

II L'evolution du Programme Télétel

1 Recettes et dépenses au 31 décembre 1987

La mise a la disposition du public d'un terminal ne donnant pas lieu, lorsqu'il remplace l'annuaire imprime, a la perception d'une redevance de location et d'entrietien (3) impliquait, pour que l'equilibre financier du programme fur assure, que les economies a en attendre et les produits tires du trafic connaissent une evolution permettant, a terme, la couverture des depenses de fonctionnement et des charges d'amortissement ainsi que la remuneration du capital. Tel ne semble pourtant pas etre le cas.

S'agissant des economies sur l'annuaire imprime, leur montant cumule au 31 decembre 187 est evalue, par la direction generale des telecommunications, a 147 millions de francs. Il est relativement modeste, compare aux depenses correspondantes qui, pour les quatre annees 1984 a 1987, se sont elevees a 2,2 milliards ; en effet, si les pages blanches de l'annuaire ne sont pas distribuees aux detenteurs de minitels, les pages jaunes, ou figure las plus grande partie de la publicite, continuent de leur etre fournies. En y ajoutant la dimunition des depenses du service de renseignements, de l'ordre de 272 millions de francs, c'est a environ 420 millions que l'administration evalue le montant cumule de ses economies au 31 decembre 1987.

A la meme date, le total des recettes diverses atteignant 122 millions. Quant aux redevances de locations-entretien, elles s'elevaient a 618 millions (4).

En regard de ces recettes, les paiements effectues au titre des acquisitions de terminaux avaient atteint 6 144 millions au 31 decembre 1987, les paiements intervenues au titre des equipements autres que les terminaux, 1 673 millions. Si l'on y ajoute les charges resultant de la distribution, soit 150 millions, on obtient un total de depenses d'investissement de 7 967 millions.

Augmenté des frais de maintenance, soit 339 millions, le total des pedenses liees au programme teletle s'etablit a 8 307 millions, non compris les depenses entrainees par les etudes et les experiences de la periode initiale, non plus que celles decoulant des concours financiers et avantage fiscaux accordes a la presse.

En regard de de ces charges, il y a lieu de faire figurer les economies et recettes mentionnees plus haut, soit 1 160 millions, ainsi que les produits tires du trafic soit 1 779 millions, le total s'elevant a 2 939 millions.

Même si le solde negatif de 5 367 millions n'a de signification economique que rapproche des perspectives du programme, considere dans sa duree, son importance retient l'attention.

2 Perspectives

Pour que l'equilibre financier du programme teletel soit assure, il faudrait que les recettes qu'on peut en escompter, diminuees des couts de maintenance, permettent d'amortit les investisements et de remunerer le capital, cette remuneration pouvant etre calculee sur la base du taux d'actualisation retenu par le commissariat du Plan, soit 8 p. 100. Or une simulation utilisant ce taux et effectuee en 1988 par l'administration elle-meme, laisse, dans sa varainte de base, un deficit de 4,1 milliars en 1995.

L'exactitude de cette simulation se verifiera en fonction, notamment, de trois parametres : l'evolution de la consommation unitaire, l'institution d'une redevance de location-entretien et la duree de vie des materiels. Des lors, il n'est pas possible d'exclure une amelioration des perspectives actuelles ni d'ailleurs une nouvelle agravation.

Premier element d'quilibre du programme minitel, la duree de vie d'un terminal retenue par l'administration, a savoir une duree moyenne de 7 ans et une duree physique maximale de 8 ans, conduit a douter de la possibilite d'amortir le cout d'acquisition de l'ensemble des equipements, terminaux et autres, sur les seules recettes du trafic, comme il a ete initialement prevu. Aussi bien, l'instauration d'une redavance de location-entretien de 10 francs, a compter de 1990, est-elle integree a la simulation.

L'evolution de la consommation unitaire moyenne est un deuxieme element d'appreciation de la rentabilite du capital investi. La duree annuelle des communications pour chaque minitel, non compris le trafic propre a l'annuaire electronique, est retenue pour 18,7 heures en 1988, 18,1 heures en 1989 et 190, pour croitre jusqu'a 22,4 heures en 1995. Il est difficile de se prononcer sur le bien-fonde de ces previsions, qui resultent d'une moyenne des consommations des entreprises et des particuliers, les preieres etant considerees comme devant se reduire jusqu'en 1994 et les secondes etant supposees augmenter de 40 p. 100 entre 1989 et 1995.

On ne peut en realite ecarter la possibilite d'une reduction de la duree moyene de la communication par minitel installe au fur et a mesure de l'augmentation du parc. Les constatations faites pour les annees 1987 et 1988 ont fourni des indices dans ce sens (2).

Parmi les autres elements qui affectent les previsions relatives a l'avenir de l'operation figurent les incertitudes liees au risque d'obsolescence technologique propre a tout programme se developpant dans un domaine en constante evolutio ainsi que celles qui tiennent aux mesures juridiques que pourrait imposer la Commission des communautes europeennes en ce qui concerne les conditions d'exploitation des services de telecommunicaitons.

En sens inverse, il n'est pas exclu que l'effort en cours pour faire prendre le relais de demande non professionnelle, que l'on espere plus stable, vienne compenser, au moins en partie, la diminution du trafic sur le reseau 36-15 grand public.

Enfin, la simulation de l'administration integre l'institution d'une redevance de location-entretien de 10 francs valeur 1987 par appreil et par mois a compter de 1990 : elle prend en compte, a ce titre, une recette de 2,8 milliards.

La decision de principe concernant l'institution de cette redevance peut etre consideree comme acquise, mais aucune date n'est actuellement fixee pour son application a l'ensemble du parc. Si la mesure annoncee venait a etre differee, le deficit du programme s'en trouverait aggrave a due concurrence.

Le retard apporte a l'institution d'une redevance de location-entretien comporte d'autres graves inconvenients. Une telle contribution financiere des usagers, en effet, serait justifiee dans la mesure ou elle faciliterait la normalisation de la gestion du parc des minitels actuels, en suscitant le retrait des terminaux inutilises. Il est en efet anormal, et il serait plus encore se la politique actuelle de gratuite devait se poursuivre, que l'administration ne soit pas en mesure de conaitre avec precision le nombre de minitels non utilises (3), alors qu'il n'est pas exclu que ce nombre soit important.

Cette question devrait l'objet d'une etude si la distribution gratuite de minitels doit se poursuivre au rhythme actuellement prevu par l'administration. La percpetion d'une redevance de location, dont le montant ne serait pas de nature a decourager les utilisateurs professionnels, pourrait contribuer a l'assainissement de la situation du parc de terminaux detenus par les usagers.

Ainsi l'option initiale en faveur de la mise a disposition gratuite des terminaux a conduit l'administration a prendre un risque financier important. Le choix de la procedure kioskque a abouti, lui, a l'impliquer tres etroitement dans des activities chargees d'incertitudes juridiques.

III Les Implications de la Procédure Dite <<Kiosque>>

Le paiement pas les usagers, base sur l'enregistrement et la facturation des communications telephoniques, constitue, comme la mise a disposition gratuite des terminaux, une des originalites du programme et sans doute un des elements qui a favorise sa rapide extension. Mais, de meme que la gratuite pose un probleme d'equilibre financier, le systeme kiosque souleve des interrogations en ce qui concerne la definition et al repartition des responsibilities. La procedure n'est pas sans risque et le dispositif juridique est inadapte.

1 Une procédure non dénuée de risques

Les communications telematiques donnent lieu a enregistrement, au comptuer de l'abonne, d'unites Telecom, selon un rhythme qui depend du tarif applicable au service consulte. Sur la base de ce premier comptage, les comptables des postes et telecommunications recouvrent, par le moyen de la facutre telephonique, les sommes dues, tant a l'adminstration qu'au fournisseur de services et au centre serveur. A l'occasion de leur acheminement par les liaisons de le societe Transpac, specialisee dans la transmission de donnees par paquets, les communications from l'objet d'un second comptage, grace a une application qui permet d'etablir, pour chauqe serveur, la synthese des connexions le concernant et, par voie de consequence, la facture justifiant le montant des reversements qui lui sont dus.

Le bien-fonde des reversements est lie d'une part a la fiabilite des comptages operes par FACTEL et d'autre part a la coherence entre ces comptaes et ceux des compteuars d'abonnes. Sur le premier point, un audit effectue au debut de 1987 par une societe specilisee n'a pas mis en lumiere d'elements permettants de doutter de la qualite de l'applications mise en oeuvre. Sur le second, un controle realise par la direction generale des telecommunications elle-meme a egalement conclu a la coherence entere le trafic servant de base aux reversements et celui enregistre par les compteurs d'abonnes.

Il reste que, par construction, les risques de non-recouvrement des sommes dues par les usagers pesent exclusivement sur l'administration des telecommunications, alors que les reversements sont calcules sur la seule consideration du trafic ecolue par Transpac. Des creances irrecouvrables donnent ainsi lieu a paiements au benefice du serveur et du fournisseur de services

Quant a son finement meme, le mecanisme sonstant a recouvrer en produits budgetaires les sommes destinees a des tiers et a les reverser par une simple operation comptable de diminution de recettes n'est pas sans soulever des reserves, au regard des regles fixees par l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances. L'extension sondiderable ainsi donnee aux depenses publiques effectues par des procedes extra-budgetaires et al creation d'une serie de compabilities particulieres retracant des affectations de produits, selin des modalities arretes au fil de conventions, risquent de rendre in dechiffrables les comptes publics et de se faire perdre de vue la vocation propre du service public et des comptables publics.

2 Un dispositif juriqique inadapté

Pour chaque service telematique, l'adminstration se trouve liee au serveur et au fournisseur de services par une convention, expressement prevue par le code des postes et telecommunications.

En reservant a la presse, usr la base d'un fondement legal qui reste a decouvrir, les services accessibles au grand public sur le reseau 36-15, les pouvoir publics ont pu penser se premunir contre des derives dont l'experience a montre qu'il y avait en effet lieu de les craindre. Cette meme experience a prouve l'inanite des precautions prises, l'Etat, par le truchement de l'adminstration des telecommunications, se trouvant en fait associe a la diffusion de services telematiques sans rapport avec sa mission.

Mettant ses equipements au service du reseau telematique, l'administraion doit prendre garde a ne pas se strouver en situations de complicite, par fourniture de moyen, a l'egard d'activities qui viendrainet a etre declarees delictueuses par le juge penal et dont le reseau teletel constituerait le support.

Or les messageries telematiques, sielles sont reputees relever de la correspondence privee lorsqu'elles donnent lieu a echanges directs entre personnes ayant accepte de dialoguer ou a depot de messages dans une boite aux lettres electronique, comportant egalement l'affichage public sur l'ecran de pseudonymes et d'annonces accessibles a n'importe quel usager disposant d'un teminal. Du fait du caractere public des messages, la responsibilite de 'administration se trouve engagee au regard de luer contenu. Cette implication se trouve sensiblement aggravee par les dispositions de la convention qui confient a l'administration le soin d'encaisser aupres de l'usager la totalite de la remuneration due par lui et d'en reverser une partie au serveur (1).

Ainsi qu'il etait a prevoir, des debordements se sont produits et ile ont entraine l'intervention de la juridiction penale. Cette intervention a eu lieu sur la base de l'article 284 du code penal qui, se refereant aux peines prevues par l'articles 283, dispose : << Sera puni des memes peines... quicconque aura publiquement attire l'attention sur une occasion de debauche ou aura publie une annonce ou une correspondance de ce genre ques qu'en soient les termes >>.

Dans un jugement rendu en premiere instance le 4 juillet 1988 (2), le tribunal de grande instance de paris a declare que certains pseudonymes et annonces etaient constitutifs du delit prevu par l'article 284 du code penal. Or les operations ainsi visees ont entraine, dans les conditions habituelles, l'encaissement de recettes par les comptables publics des postes et telecommunications et le reversement par l'agentcomptable central d'une partie de ces recettes aux servers hebergeant les services mis en cause.

Si la qualification reteunye par le tribunal etait confirmee en appel, la Cour des comptes devrait en preciser les consequences dan ses arrets sur les comptes des postes et telecommunications.

Il appartient aux pouvious publics, responsables au premier chef de cette situations, de prendre les mesures qui s'imposent. La notion d'ordre public interdit a un service public, a fortiori lorsqu'il a le statut d'une sdministration d'Etat, d'encaisser des produits lies a des operations qualifees delictueuses par le juge penal au exposees a etre qualifees telles. In ne parait pas que l'effort conduit en 1987 en vue d'assortir les conventions d'un code de deontologie ait ete suffisant.


Par la variete de ses possibilities, la telematique constitute, parmi d'autres, l'un des moyens modernes de la communications. La valeur pedagogique de la distribution gratuite au grand public de terminaux simples ne doit pas etre sous-estimee. Elle ne peut cependant soustraire le programme d'investissement, decide par les pouvoirs publics, a une premiere evaluation financiere.

La demarche francaise en matiere de videotex, radicalement differente du mode de developpement adopte par les pays etrangers, a certes abouti a la constitution d'un parc de plus de quatre millions de minitels. Mias, outr que l'administration n'est pas en mesure de connaitre le nombre de terminaux reellement utilises, la demande est ainsi artificiellenemtn creee. Les fonds affectes a l'acquisituion des terminaux auraient pu recevois une autre afffectation, voire etre laisses a la disposition des usagers, notamment des entreprises, par une reduction du cour de la communication telephonique.

Cinq ans apres la mise en service effective du videotex, la rentabilite du programme teletel apparait incertaine dans le mesure ou elle est liee a des hypotheses qui pourraint n'etre pas confirmees, qu'il s'agisse de la duree moyenne des connexions ou de la date a laquelle pourra etre institutee la redevance de location-entretien.

A ces incertitudes viennient s'ajouter des problemes juridiques non resols. Les operations auxquelles le reseau telematique a servi de support ont en effet cree une situations a laquelle il importe que les pouvoirs publics mettent un terme par l'adoption d'une legislation appropriee.


Reponse du Ministre des Postes, des Télécommunications et de l'Espace

Le ministre des postes, des télécommunications et de l'espace rend hommage au travail remarquable accompli par la Cour, et ne peut manquer d'être sensible à certaines appréciations élogieuses portées sur le developpement du minitel en France. Néanmoins, il estime devoir apporter des correctifs à certain reproches exprimés, ainsi qu'insister sur certain aspects positifs sans doute excessivement estompés.

1 Les Reproches Formules par la Cour

Ceux-ci portent essentiellement sur les aspects financiers (partie A) et les aspects comptables et juridiques (partie B).

A - Aspects financiers

La Cour releve que le programme apparait comme deficaire, non seulement en l'etat (II.A), mais meme a terme.

S'agissant du deficit au 31 decembre 1987, la Cour le chiffre a 5 367 millions, representant le difference entre un montant total de depenses de 8 307 millions et un montant de produits du trafic et d'economies realises de 2 939 millions.

Il convient, pour complete ce blan, de prendre deux elements supplementaires.

Le premier consiste dans les redevancesreversees par Transpac au budget annexe. En effet, s'il est legitime de compter en depenses les reversements effectues a Transpac au titre du programme Teletel, il l'est en bonne logique tout autant de compter en recettes les redevances versees par Transpac pour l'utilisation de son reseau. Ce seul poste represente, jusqu'en 1987 inclus, une rentree de quelque 650 millions de francs, nullement negligeable donc au regard des sommes precitees.

Le second est represente par le trafic telephonique induit par l'anuaire electroniqe. Ce dernier a ecule, en 1988, 372 millions d'appels, contre 177 millions seulement pour le service des renseignements par operateur. Il est permis de penser que cette information de qualite fournie par the << 11 >> a genere un important trafic telephonique, donc des recettes.

En tout etat de cause, ainsi que le souligne la Cour elle-meme. << le solde negatif ... n'a de signification econmique que rapproche des perspectv3es du programme, considere dans sa duree >>.

Aussi ce reproche, formule en II.B << perspectives >>, de persistance d'un desequilibre financier a l'horizon 1995 apparait-il comme devant appeler une mise au point. Si, ainsi qu'indique precedemment, on tient compte des versements effectues par Transpac a France Telecom, on voit que ceux-ci ont pour effet de reequilibrer le bilan, sans meme tenir compte des effets induitsevoques et difficilement chiffrables.

Il est donc excessif d'affirmer que le programme ne trouvera jamais son equilbre financier ; il s'agit d'une operation de grande envergure dont la rentabilite est certaine mais doit s'apprecier dur une plus longue periode.

En ce qui concerne le paiement du minitel, aucune decision n'est prise. La Commission de la telematique invite a agir avec une grande prudence et a ne pas prendre de decision precpiitee qui ne serait pas entouree d'un certain nombre de precautions. L'enjeu financier France Telecm est certes important et le souci d'equilibre est a prendre en consideration, mai il convent de ne rien entreprendre qui complomette la dynamique du developpement de la telematique.

B - Aspects Compables et Juridiques

La Cour, dans la partie III de son rapport, formule des critiques a l'egard des procedures comptables (III.A) et du dispositif juridique (III.B).

1 Procédures comptables (III.A)

La Cour formule a leur égard deux rreproches :

Le premier est que le systeme de kioskque, France Télécom s'expose a devoir payer des serveurs alors meme qu'elle ne pourra pas recouvrer les redevances de communications correspondantes.

D'une maniere générale, le risque de créances irrécouvrables est lié a la nature d'activité de France Télécom, qui dans l'immense majorité des cas ne fait payer ses prestationsqu'apres service fait. Sans doute, au cas présent, l'obligation de payer a un serveur rend-elle ce risque un peu plus aigu. C'est pourquoi le service a estimé se couvrir globalement en prenant une mare de 9 p. 100 sure les sommes reversees.

La second reproche porte sur la validité du mécanisme lui-meme au regard de l'ordonnance du 2 janvier 1959. Il sera simplement observé ici que ce mécanisme a été instauré par un décret en Conseil d'Etat, qui a créé un article R.* 54-1 ; ce dispositif n'a fait depuis lors l'objet d'aucun recours contentieux et a deux autres reprises le Conseil d'Etat n'a pas formulé d'objection a la création de dispositifs analogues (R.* 54-2 pour les reversements a Transpac et R.* 54-3 pour ceux aux fournisseurs de service de radio-messagerie unilatérable).

2 Dispositif juridique (III.B)

La Cour formule deux reproches :

Sur le premier point il sera observe que si la limitation aux organes de presse de l'access a la fonction de fournisseurs de service n'a pas suffi a eviter des debordements, ceux-ci eussent sans doute ete bien pires si l'access avait ete rendu totalement libre. Choisir le critere de l'inscription a la commission paritaire des organes de presse presentait au moins l'avantage de se rattacher a un dispositif ancien, bien rode, dans lequel la responsibilite des personnes physiques est nettement definie.

Quant aux debordements constates, c'est un probleme dont la presse s'est fait largement l'echo. Meme si de tels agissements n'avaient pas ete prevus au depart, il n'en pas moins dans la nature humaine de trouver des utilisations malveillantes a tout moyen nouvaue : le telephone n'y avait pas echappe en son temps. Le ministere des postes, des telecommunications et de l'espace est sensible a l'image de ses produits et ne souhaite pas la voir degradee par des utilisations abusives. Aussi a-t-il, des 1987, revu le dispositif contractuel le liant aux fournisseurs de services. C'est ainsi que de nouvelles conventions types ont ete elabborees et un code de deontologie leur a ete incrpore. Par ce dernier, il est fait rappel de la legislation applicable notamment dans les domaines de la communications audiovisuelle, des bonnes moeurs et des informations boursieres. En outre, afin d'eviter les exces constates dans la promotion de certain services, les fournisseurs on ete astreints a afficher leur identite sur tout support publicitaire et a la publicite (B.V.P.). Enfin, deux amenagements importants de la convention visaient, d'une part, l'obligation pour tout fournisseur d'assurer une surveillance constante de son service, d'autre part, la possibilite ouverte a France Telecom de resilier la convention, en cas de non-respect des stipulations de celle-ci, apres une mise en demeure restee sans effet. Ce document a ete redige en accord avec la Commission de la telematique et la Chancellerie.

Cette procedure s'est revelee efficace. En effet, depuis la mise en place de ce nouvaue dispositif contractuel a la fin de l'ete 1988, quelque 800 mises en demeure ont ete adressees a des fournisseurs qui ne respctaient pas leurs engagements conractuels, tout particulierement ceux destines a assurer la transparance du service. Dans l'immense majorite des cas mises en demeure ont ete suivies d'effet ; dans les quelques cas ou il n'en a rien ete, la resiliation du contrat a ete prononcee, sur avis favorable du comite consultatif des kioskques telematiques et telephoniques. Il est a cet egard certain que l'association des professionnels de la telematique a l'exercice de ce pouvoir de sanction dans le cadre du comite consultatif a eu pur resultat de responsabiliser l'ensemble de la profession.

Au surplus, il conveient de souligner que le trafic (hors annuaire electronique et 36.15) par minitel installe a ete en croissance continuelle depuis deux ans, au point de pratiquement doubler, alors que dans le meme temps le trafic total des messageries etait divise par deux.

Aller au-dela, ainsi que le demande la Cour, releve de la competence d'autres departements ministriels, celui de la justice notamment, qui a clairement xprime, notamment dans les responses a des questions ecrites, qu'il tirerait au plan legislatif les consequences eventuelles de l'arret a intervenir de la Cour d'appel sur the jugement de 4 juillet 1988.

II Les Aspects Positifs Insuffisamment Evoques

Ayant ainsi répondu point par point aux différentes critiques formulées, le ministre des postes, des télécommunications et de l'espace estime devoir mettre en exergue certains aspects du programme Télétel à son avis inusffisamment soulignés par la Cour : tout d'abord sa réussite, puis ses retombées techniques et industrielles et son impact sur l'image des télécommunications françaises.

A - Sa Réussite

Lorsqu'un plan de quelque envergure n'atteint pas ses objectifs, la critique survient aussitôt. Au cas présent, la réussite technique est totale : il y a àl'heure actuelle plus de 4 millions de minitels en France, trafiquant inégalement certes (à une moyenne de 100 minutes par mois cependant), mai n'en représentant pas moins une expérience en pointe au plan mondial. Est-il nécessaire de rappeler que la France n'était pas partie en tête dan ce domaine ? En particulier le Royaume-Uni avait ouvert le service Prestel, tandis que le Canada développait le système Telidon er la République fédérale d'Allegmagne le système Bildschirmtext. Il suffit de voir où en sont aujourd'hui les programmes comparables des grands pays étrangers pur conclure que les options terminal gratuit et kiosque ont assuré le << décollage >> du système.

B - Ses Retombées Techniques et Industrielles

Lors du lancement du programme Télétel, la France disposait déjà d'une industrie du logiciel mais était absente de la fabrication des terminaux et démarrait tout juste le plan composants.

En quelques années, des résultats considérables ont été obtenus. Le principal fabricant de minitels Télic Alcatel, est passé d'une fabrication quasi électronmécanique au tout électronique et est devenu le plu important producteur mondial de terminau de cette nature.

Parallélement, grâce aux retombées industrielles induites par la production de composants et l'acquisition du savoir-faire, un e industrie (déjà appelée << périminitélie >>) s'est construite,portant sur les micro-ordinateurs et tous les appareils connectables au minitel ou d'émulation du minitel. Elle represénte en 1988 un chiffre d'affaires de 350 millions de francs pour des P.M.I.-P.M.E. qui n'existaient pas il y a dix ans.

Pour ce qui concerne les conposants, le premier circuit à haute intégration fabriqué en France a été celui du modem du minitel. Ce modem a d'ailleurs été le premier au monde á être réalisé sous la forme d'un seul composant. A la seule exception des mémoires, tous les composant, qu'ils soient spécifiques (modem, circuit de visualisation) ou de série (microprocesseurs), sont fabriqués par l'industrie française. Le minitel a donc fortement contribué au developpement du plan composants. Moins connus sans doute, main aussi importants sont les deux autres éléments du système : le réseau constitué des points d'accès vidétex (PAVI) et du réseau de données Transpac, d'une part les serveurs, d'autre part.

Les PAVI représentent une réalisation qui n'a pas d'équivalent ailleurs : ils sont la première concrétisation opérationnelle du concept de réseau intelligent appelé à se développer largement dans le futur.

Le réseau Transpac est le premier réseau de données du monde par son importance : il doit la moitié de son trafic au minitel.

Quant aux serveurs, ils ont dû à cette occasion creér un savoir-faire spécifique. On doit rappeler ici que l'annuaire électronique constitute le plus grand système d'informatique répartie au monde.

Traduites au plan économique, ces retombées industrielles peuvent se résumer par quelques chiffres : 12 000 à 15 000 personnes (dont 50 p. 100 d'emplois nouveaux) et une valeur ajoutée de 6 milliards de francs en 1988.

C- L'Impact sure l'Image des Télécommunications Françaises

Il est banal de rappeler que l'image des télécommunications françaises dans le monde a long-temps été mauvaise, et que le simple rattrapage quantitatif, voire qualitatif en matière de téléphone n'eût sans doute suffi à attirer l'attention. Ici, pour la première fois sans doute dans ce domaine, la France est en pointe. Sans faire preuve d'un chauvinisme déplacé, il est réconfortant de voir des ingénieurs des plus grands pays étrangère venir sur place étudier le phénomène, en méme temps que la presse reproche à ses ministres respectifs ce qu'elle considère comme leur échec dans ce domaine.

Il était sans doute nécessaire de rappeler ces quelques aspects pour montrer que d'autres plus critiquables, sans doute inhérents à toute entreprise nouvelle, ne doivent pas les occulter.


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